lundi 28 février 2011

Les femmes comme muses

Dora Maar, l'inspiration de Pablo Picasso

Dora Maar, D.R
Henriette Theodora Markovitch est davantage connue sous le pseudonyme de Dora Maar. Artiste peintre et photographe, elle a partagé sept années de la vie du plus grand des cubistes, Pablo Picasso. Elle arrive à Paris en 1926 et s'inscrit dans plusieurs cours d'arts décoratifs notamment à l'Académie Julian à l' Ecole des Beaux Arts, la seule qui offrait à l'époque un enseignement équitable entre les femmes et les hommes. Dora a eu la chance de fréquenter de nombreux ateliers dont celui d'André Lhote où elle rencontre Henri Cartier Bresson, avant de créer ses propres espaces. En 1935, elle est engagée comme photographe de plateau sur le film Le crime de Monsieur Lange, réalisé par Jean Renoir. Pendant le tournage, et par l'intermédiaire de Paul Eluard, elle rencontre Pablo Picasso aux Deux Margots à Paris.Une parmi tant d'autres. Olga, Marie-Thérèse, Françoise, Jacqueline... Dora, une muse, une égérie, une maîtresse et un modèle. 

La femme qui pleure, Pablo Picasso, 1937
La femme en pleure est le portrait le plus connu de Dora, réalisé par Picasso comme un "symbole de la souffrance des femmes espagnoles confrontées à la guerre civile et la montée du fascisme". Dotée d'une forte personnalité, elle exerçait un pouvoir de séduction sur les hommes de son entourage. Sensualité qui lui a ouvert les portes de l'atelier de Picasso, lui permettant notamment de photographier les étapes successives de la création de Guernica. Ces clichés constituent aujourd'hui un témoignage exceptionnel du travail de son amant. 

Très éprise du peintre, elle ne supportait ses débordements et ses tromperies perpétuelles qui mettront fin à leur liaison en 1943. Atteinte de dépression nerveuse, elle passera quelques temps dans un hôpital psychiatrique, pour finir ses jours dans une maison offerte par Pablo Picasso à Ménerles, dans le Vaucluse. Décédée en 1997, tout le monde s'accorde pour dire que cette femme, militante révolutionnaire a eu une influence artistique et politique sur le peintre. Convaincue de l'immense talent de son amant, elle ira jusqu'à dire que "Dieu seul pouvait succéder à Picasso".

Pour en savoir plus :
- Les vies de Dora Maar: Picasso, Bataille et les surréalistes, Mary Ann Caws, Thames&Hudson, 2000, 224 pages. Disponible à la Médiathèque Louis Aragon du Mans
- Moi, Dora Maar, Nicole Avril, Plon, 2002, 224 pages. Disponible à la Médiathèque Louis Aragon


Georges Sand, l'inspiration de Chopin
Lorsqu'ils se rencontrent pour la première fois en 1836, à l'Hôtel de France, ils sortent tous les deux d'une histoire amoureuse difficile. L'année précédente, lors d'un voyage en Allemagne, Chopin tombe sous le charme d'une Wadzinski. Prêt à l'épouser, le mariage est interrompu par le père de la jeune fille qui mettait en doute les revenus du musicien. George Sand, quant à elle, vient de rompre avec Alfred de Musset qui écrira "Tu t'es cru ma maîtresse, tu n'étais que ma mère", et elle de répondre "Ah! pauvre homme que vous êtes fou ! O mes pauvres enfants que votre mère est malheureuse." La rencontre de Chopin et Sand ne fut pas un coup de foudre. Il dira à ses amis Liszt et Marie d'Agoult, présents ce jour là "Elle est antipathique cette Sand ! Est-ce bien une femme? J'arrive à en douter." Et pour cause, pour des raisons financières, Amantine Aurore Lucile Dupin qui choisit le pseudonyme masculin de G. Sand lors de la publication de son premier roman Indiana (1832), a pris l'habitude de se vêtir en homme tout en conservant une part de sa féminité. Balzac dit d'elle un jour qu'il lui rendait visite "J'ai trouvé la camarade Sand fumant un cigare après le dîner, elle avait doublé son menton comme un chanoine et pas un seul cheveu blanc malgré ses malheurs... Elle travaille énormément... Elle se couche à six heures du matin et se lève à midi... Elle a été malheureuse avec Musset et elle condamne le mariage et l'amour... Elle n'est pas si aimable, elle est garçon, elle est artiste, grande et généreuse, dévouée, chaste...". Femme de conviction,  elle voulait à travers ses écrits bousculer les conventions sociales, défendre les ouvriers et les pauvres. Elle imaginait une société sans classes et sans conflits. Elle revendiquait la place de la femme indépendante dans cette société dominée par la gent masculine. Elle fut d'ailleurs la seule femme admise aux dîners Magny réunissant Théophile Gautier, Jules et Edmond Goncourt, Sainte Beuve... 

George Sand et Chopin, D.R

C'est elle qui va faire le premier pas en envoyant un mot à Chopin "On vous adore ! George", qu'il rangea immédiatement dans son album intime. Leur liaison dura neuf ans, mais leur intimité seulement quelques mois. George Sand avait la réputation d'être plus une mère qu'une maîtresse, une figure protectrice plus qu'une séductrice. Les rôles étaient inversés dans leur relation. La romancière prenait la plupart des décisions et lorsqu'elle sortait pour rejoindre ses consœurs, le compositeur lui faisait des crises  de nerfs, elle le retrouvait perdu et agité sans sa présence. La vie amoureuse de George Sand l'aura conduit dans les bras de nombreux grands pontes de la vie intellectuelle et artistique du XIXème siècle. Tel un homme, elle aura su se faire respecter tout en supportant les humiliations de sa vie amoureuse agitée.

Pour en savoir plus:
- Chopin dans la vie et l'oeuvre de George Sand,  Marie Paule Rambeau, Les Belles Lettres, 1985. Disponible à la médiathèque Louis Aragon du Mans

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